Top 20 : Films de huis clos

6. Abyss (1989) de James Cameron

Synopsis : Un sous-marin nucléaire américain, entre en collision avec un objet non identifié et se retrouve immobilisé par plusieurs centaines de mètres de fond. Les techniciens de la plate-forme sous-marine Deepcore, menés par Virgil Brigman, sont alors réquisitionnés pour tenter de retrouver le submersible. Des soldats les accompagnent. Alors que les plongeurs ne retrouvent aucun survivant, d'étranges phénomènes lumineux se produisent sous l'eau.

Surfant sur la vague et l'engouement pour les aventures aquatiques provoqués par la sortie du film Le grand bleu un an plus tôt, James Cameron exhume une histoire qu'il a écrite à l'âge de 17 ans sur des plongeurs isolés du monde extérieur, la remanie puis finit par l'adapter pour le grand écran. Fort du succès de ses premiers films Terminator et Aliens, il a l'aval de la Fox pour produire le film.
Le tournage, dont l'essentiel eut lieu dans une gigantesque piscine d'une ancienne centrale nucléaire, fut compliqué et harassant le cinéaste n'hésitant pas à mettre en danger la vie de Ed Harris pour réussir un plan. Le film rencontra un relatif échec à sa sortie et ce n'est qu'après l'édition d'une nouvelle version avec 38 minutes supplémentaires qu'il devint un succès commercial.


Le choix des acteurs pour les deux rôles principaux se porta sur Ed Harris et Elizabeth Mastrantonio après que de nombreuses autres vedettes du grand écran furent envisagées et ce n'est pas plus mal car leur performance est convaincante.


Comme pour la plupart de ses films (exception pour Titanic), James Cameron ne brille pas par son scénario, véritable patchwork de situations souvent invraisemblables avec une philosophie de comptoir et des personnages parfois caricaturaux étant soit dans la catégorie des bons soit dans celle des méchants, la dichotomie étant totale. L'art du cinéaste réside dans sa capacité à captiver le spectateur par la création d'un univers original de toute beauté. C'est le cas ici avec des aliens féériques et des innovation techniques qui laissent pantois comme le ver d'eau.

Alors ne boudons pas notre plaisir et profitons du spectacle.

7. Garde à vue (1980) de Claude Miller

Synopsis : Deux fillettes ont été violées et assassinées en moins d'une semaine. L'inspecteur Antoine Gallien poursuit son enquête jusqu'en cette soirée de la Saint-Sylvestre. Il convoque le notaire Martinaud, qui a retrouvé le corps d'une des victimes, et découvre que celui-ci pourrait bien être l'assassin...

Quand on propose à Claude Miller d'adapter le roman policier "A table !" de  John Wainwright, il n'hésite pas car depuis l'échec de son dernier film Dites-lui que je l'aime, il doit se contenter de réalisations publicitaires.
Suite au refus d'Yves Montand pour incarner l'inspecteur Gallien c'est Lino Ventura qui est choisi tandis que Michel Serrault, soucieux de rompre son image de comique accepte d'interprèter le rôle de maître Martinaud.
L'affrontement des deux acteurs est le clou du spectacle et un petit chef-d'œuvre d'interprétation. Ventura excelle dans ce rôle d'un homme bourru qui retient sa colère parfois désarçonné par la morgue de Serrault qui résiste aux assauts du commissaire avec un humour incisif. Mention bien à Guy Marchand qui incarne cet inspecteur qui, excédé, finit par brutaliser le suspect. Si elle a un rôle mineur Romy Schneider n'en imprègne pas moins l'écran de sa présence dégageant une impression tragique de désespoir.


Les dialogues écrits par Michel Audiard font mouche avec une noirceur inhabituelle. Sous la pression de Lino Ventura il a laissé de côté ses expressions colorées en argot qui ont fait sa réputation et il est curieux de voir que c'est dans ce cas qu'il a obtenu l'unique oscar de sa carrière. La belle photo de Bruno Nuytten et la musique nostalgique de Georges Delerue créent une atmosphère glaciale qui permet la mise en valeur des échanges verbaux.


Le final est poignant et le drame du couple Martinaud réussit à retourner le spectateur dans l'appréciation des caractères des deux personnages principaux. La qualité d'écriture et celle de l'interprétation se traduisit par un gros succès public et de nombreuses récompenses bien méritées.

8. La maison du diable (1963) de Robert Wise

Synopsis : Le docteur Markway, désireux de mener à bien ses études et à prouver que les phénomènes paranormaux existent, invite un groupe dans un manoir hanté...


Quand Robert Wise s'attaque à cette adaptation du roman The Haunting of Hill House de Shirley Jackson, il est à l'apogée de sa gloire après l'immense succès de West side story. Pour ce réalisateur qui a touché à tous les genres c'est un retour aux sources où il avait signé deux films d'horreur La malédiction des hommes-chats et surtout Le récupérateur de cadavres en appliquant la consigne de Val Lewton « suggérer plutôt que montrer ».


Bien que le thème de la maison hantée ait déjà été abordé dans d'autres films, le cinéaste va poser les bases d'un nouveau concept. Ce ne sont plus des fantômes a proprement parler qui se manifestent mais le manoir lui-même qui devient une entité menaçante. Et quel manoir ! Il semble issu d'un cauchemar avec son aspect gothique, ses statues et ses courbes torturées. La menace se traduit par le truchement de l'esprit d'Eleanor Lance (Julie Harris), jeune femme névrosée qui petit à petit s'identifie à une infirmière ayant occupé les lieux. Tout l'art de la mise en scène est d'amener le spectateur à ressentir la folie et la peur qui envahit cet être hypersensible qui se croit possédée par la demeure malveillante. Robert Wise joue avec le décor et les visages angoissés. Prise en plongée ou en contre-plongée, lignes de fuites démesurées, distorsion de l'image à l'aide d'un grand angle, surimpressions fugitives, tout l'arsenal technique est employé avec virtuosité pour créer la peur. Peur d'autant plus prégnante que la présentation de l'histoire du manoir à l'aide d'une voix off dans le préambule a créé chez le spectateur une attente et une appréhension qui permet à son imagination de se développer.
Les autres membres de l'équipe de visiteurs viennent tempérer par instant le climat d'angoisse ce qui permet de relancer avec plus de tension les moments forts du film.


J'ai vu ce métrage à plusieurs reprises mais même en connaissant le dénouement j'ai été surpris par l'effet toujours aussi stressant qu'il pouvait avoir. Des scènes comme celle de l'escalier en spirale ou de la porte qui enfle vous marquent de manière indélébile ce qui me semble prouver la grande maîtrise de sa réalisation. Ce film a été copié et utilisé à maintes reprises mais jamais on n'a atteint une telle perfection.

9. Shining (1980) de Stanley Kubrick

Synopsis : Écrivain, Jack Torrance est engagé comme gardien, pendant tout l’hiver, d’un grand hôtel isolé du Colorado, l’Overlook, où il espère surmonter enfin sa panne d’inspiration. Il s’y installe avec sa femme Wendy et son fils Danny, doté d’un don de médium. Tandis que Jack n’avance pas dans son livre et que son fils est de plus en plus hanté par des visions terrifiantes, il découvre les terribles secrets de l’hôtel et bascule peu à peu dans une forme de folie meurtrière où il s’en prend à sa propre famille…

Soucieux de retrouver un succès au box office après l'échec relatif de Barry Lindon, Stanley Kubrick adapte The shining, le roman de Stephen King. Il collabore avec Diane Johnson, spécialiste du roman fantastique,  pour l'écriture du scénario qui présente d'importantes différences avec le roman d'origine, ce qui lui vaudra la rancœur de son auteur.


Ici la maison hantée est un hôtel perdu dans un paysage désolé avec d'immenses pièces, d'interminables couloirs et jouxté par un labyrinthe végétal. La présentation de cet établissement en préambule annonce le drame qui va s'y jouer en écho de celui qui s'y est déroulé des années auparavant.


Quand l'hôtel se vide tout est en place pour que l'horreur commence. Le film est basé sur la schizophrénie de Jack, un écrivain en manque d'inspiration capable de violence sur son jeune fils. Qui d'autre que Jack Nicholson, alors au sommet de la célébrité, aurait pu interpréter avec la même démesure ce personnage menaçant au regard halluciné et au visage grimaçant ? En contrepoint Shelley Duvall incarne une femme effacée impuissante devant la démence de son mari. Le jeune Danny (Danny Lloyd) qui partage son don de télépathie (le fameux shining) avec un ancien employé de l'hôtel (Scatman Crothers) va jouer le rôle de catalyseur et de ce fait déchainer la violence de don père.


Quand on regarde Shining on est fasciné mais on n'éprouve pas les mêmes sensations que dans un classique film d'horreur. Comme pour tous les genres qu'il a abordé, Kubrick a innové et laissé son empreinte par l'originalité du traitement et la perfection de chaque plan. Dédaignant l'obscurité synonyme habituellement de peur beaucoup de scènes sont fortement éclairées. L'utilisation de nombreux miroirs et de la dualité (comme pour les sœurs jumelles ou la chambre 637) illustre le dédoublement dont est victime Jack. L'emploi d'une steadycam favorise le dynamisme dans des travellings comme pour les déambulations de Danny sur son tricycle ou encore la poursuite dans le labyrinthe. Montage serré et gros plans dans les scènes où la folie de Jack est à son paroxysme. Le  spectateur est prisonnier du rythme imposé par le cinéaste. Les seules scènes hors tension sont celles où Jack se réfugie dans le bar de l'hôtel mais chacune d'elles annonce une nouvelle crise.


L'image qui clôture le film, une photo où on voit Jack présent dans l'hôtel des dizaines d'années auparavant a fait couler beaucoup d'encre et est sujette à de nombreuses interprétations comme pour la scène finale de 2001. Shining est un film à part qui peut déstabiliser par son originalité, moi j'adore.